« Dix-sept heures à Washington,
district de Columbia, capitale fédérale des Etats-Unis d’Amérique, cœur de
l’hyperpuissance impériale et cité du gossip
et des milles intrigues. Ali Bacha sort d’un immeuble discret de K Street. Il y
a passé la journée en compagnie de représentants de l’administration Bush et
d’une flopée de conseillers en affaires publiques, dénomination habituelle pour
désigner les lobbyistes dont la densité dans cette partie nord-ouest de la rue
est la plus élevée au monde. De grande taille, mince, la soixantaine alerte, le
profil aquilin, les yeux bleus et une chevelure blanche plaquée vers l’arrière,
l’homme porte beau et attire immanquablement regards et sourires. C’est
d’autant plus vrai qu’il affiche une mine détendue laquelle tranche avec la
tension lasse des gens qui viennent de débaucher, la plupart mus par l’envie de
rentrer au plus vite chez eux. Cela passera par une bonne heure, voire plus,
dans le métro ou le train de banlieue puis, peut-être, autant sur la route. »
_Quatorze nouvelles qui se déroulent toutes le 20 mars 2003, par une nuit de pleine lune, alors que les Etats-Unis d’Amérique et leurs alliés déclenchent l’invasion de l’Irak pour renverser le président Saddam Hussein et son régime.
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lundi 19 juin 2017
vendredi 16 juin 2017
Extrait 9/14 : désert irakien
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« Le désert irakien, à l’ouest, bien loin de la frontière jordanienne. La route, un ruban sombre à deux voies dans un sens, autant dans l’autre. De jour, une fuite monotone à travers les collines chauves et les vasières asséchées depuis l’aube des temps. La nuit, une odyssée au plus profond des nudités et des ténèbres bleutés. La route, donc, dans son calme éthéré. Un taxi collectif surgit, presque neuf, déjà deux cent mille kilomètres au compteur, peut-être plus. Sûrement plus. Une Toyota, Land Cruiser, Série 8, année 1998. Un bloc d’acier qui fend l’air glacial. Soudain, l’élan se brise. Crissement des freins, gomme brûlée, étincelles sur l’asphalte et une, deux, trois embardées du véhicule qui manque de se renverser. Puis, le silence et, toujours, l’étrange géométrie des lieux et leurs formes irréelles sous le nacre lunaire. Au loin, les lumières de Ramadi pointillent. Quelques minutes suspendues puis le véhicule repart, phares éteints, roulant au milieu de la chaussée.
« Le désert irakien, à l’ouest, bien loin de la frontière jordanienne. La route, un ruban sombre à deux voies dans un sens, autant dans l’autre. De jour, une fuite monotone à travers les collines chauves et les vasières asséchées depuis l’aube des temps. La nuit, une odyssée au plus profond des nudités et des ténèbres bleutés. La route, donc, dans son calme éthéré. Un taxi collectif surgit, presque neuf, déjà deux cent mille kilomètres au compteur, peut-être plus. Sûrement plus. Une Toyota, Land Cruiser, Série 8, année 1998. Un bloc d’acier qui fend l’air glacial. Soudain, l’élan se brise. Crissement des freins, gomme brûlée, étincelles sur l’asphalte et une, deux, trois embardées du véhicule qui manque de se renverser. Puis, le silence et, toujours, l’étrange géométrie des lieux et leurs formes irréelles sous le nacre lunaire. Au loin, les lumières de Ramadi pointillent. Quelques minutes suspendues puis le véhicule repart, phares éteints, roulant au milieu de la chaussée.
Il s’est passé quelque chose. »
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Extrait 8/14 : Alger
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« La nuit s’est
installée sur l’hôpital Mohamed Seddik Benyahia, dans la banlieue est d’Alger,
là où les terres agricoles glissent doucement dans la mer. Hafs, chirurgien et
urgentiste, fume en scrutant le ciel. Indifférent au froid et à l’humidité, il est assis à même le gravier, le dos posé contre la façade borgne de la
morgue. L’endroit et tous les bâtiments sont plongés dans l’obscurité
depuis le début de la soirée. Une panne ou peut être un sabotage... Tout à l’heure, quand l’électricité est
partie et que le groupe électrogène s’est déclenché dans un fracas de pétarades
et de vapeurs de mazout, Hafs est monté sur le toit d’une ambulance pour
regarder vers l’ouest. Là-bas, de l’autre côté de la baie, les scintillements
de la capitale avaient disparu eux-aussi. Pourtant, la ville lui a paru plus
blanche que d’habitude, comme si un projecteur était braqué sur elle depuis les
cieux. A quoi bon tant de lumière, a-t-il pensé. Alger, fidèle à ses tristes
habitudes nocturnes, devait déjà dormir, ses rues envahies par un calme
sinistre. »
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dimanche 11 juin 2017
Extrait 3/14 : Ur
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« Il est accroupi, seul dans la nuit froide,
enveloppé par le silence du désert et une clarté aigüe. Venu de l’est, le vent
lui apporte en sifflant des odeurs de rocaille humide, de terre brûlée et des
relents de charognes. De son poste de guet, il voit une rivière de chaux couler
en nappes sur Ur et ses faubourgs. Il se dit qu’un lambeau arraché au ciel de
midi a été abandonné sur les tumulus et les collines poissées. Tout autour,
l’ombre des ruines prend des formes inquiétantes tels ces halos piquetés de
petites auréoles sombres. Son regard se promène sur les vieilles pierres. Ici,
à Qamirnah, la lune est dans sa cité. Déesse, elle y prend ses aises car
d’invisibles dévots célèbrent son culte.
Il ne les voit pas mais il sait. »
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vendredi 19 mai 2017
Pleine Lune sur Bagdad : présentation
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Parution le 8 juin 2017
Parution le 8 juin 2017
Le 20 mars 2003, par une nuit de pleine lune, les Etats-Unis d’Amérique et leurs alliés déclenchent l’invasion de l’Irak pour renverser le président Saddam Hussein et son régime. Au même moment, de Bagdad à Casablanca, de Gaza, Tunis, Washington à Paris, des destins basculent, des drames se nouent à huis clos. Deux contrebandiers s’enfoncent dans le Najd saoudien, un couple de koweïtiens se retrouve face à ses démons, des amis récitent des vers dans une vieille demeure de Damas, un chirurgien algérien évoque la guerre, un commando mène un coup de force à Beyrouth tandis qu’un chauffeur de taxi jordanien et ses passagers font une bien étrange rencontre dans le désert irakien.
Au fil de quatorze nouvelles, l’écrivain et journaliste Akram Belkaïd revient à sa façon sur un moment clé de l’histoire du Moyen-Orient et, plus particulièrement, de l’Irak. Des textes indépendants mais liés par une unité de temps et irrigués par la puissance évocatrice de la poésie arabe.
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